SIX TENTATIVES D’AUTOPORTRAITS
Depuis plusieurs années, l’autoportrait prend une place de plus en plus importante dans mon rapport à la photographie. Se photographier ne serait-ce pas s’éprendre de son image, se prendre pour une image ?
» N’est-ce point penser à la mort que de se regarder au miroir ? N’y voit-on pas son périssable ? l’immortel y voit son mortel. Un miroir nous fait sortir de notre peau, de notre visage. Rien ne résiste à son double «
(Paul Valéry).
Une interrogation, un questionnement sur son propre corps me semble devoir passer par la manipulation de ce corps à la manière d’une « autopsie photographique« .
On n’autopsie que les morts. Mon propre corps à cessé d’exister quand, par le truchement de la prise de vue, j’en ai saisi l’image. C’est à ce moment qu’il peut devenir substance existant comme matière, agissant sur les sens.
Faire exister une image c’est aussi la donner en pâture au regard des autres. C’est leur faire une proposition de regard, une proposition qui peut et qui doit susciter un questionnement. Non pas sur les conditions de réalisations techniques de ces images mais sur le pouvoir qu’elles ont de dénoncer, de travailler, de modifier les réalités.
C’est dans cette optique que mon travail se tourne, interrogeant le matériau photographique en liaison avec la question du rapport photographié/photographiant, notamment par la réalisation d’autoportraits photogrammes. Les travaux réalisés sont le résultat du mélange de plusieurs techniques photographiques : utilisation de radiographies du corps humain, utilisation de la technique du photogramme comme une possibilité de traduire par la lumière ce qui passe par le corps, éclairé de l’intérieur. C’est faire subir au bromure d’argent l’épreuve de la lumière à la façon des rayons X.
– se reposer dans le noir.
– se voir dans la lumière.
Le résultat présenté est celui de six autoportraits assemblés les uns par rapports aux autres selon une logique qui leur est propre. Ils reflètent un moment de mon interrogation sur le matériau photographique.
Olivier Perrot
Bulletin de la galerie CONTRETYPE, Bruxelles, n° 42, mars, 1994
Six tentatives d’autoportraits de le série Röntgen
198 photogrammes 18×24 encadrés soit L 4,2xH2,5 m
Date de réalisation 1991-1994