Olivier Perrot

Le dernier vol

2018
Série
Photogrammes d’abeilles
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Mais oui ! Nous les reconnaissons. Ce sont bien elles. Ce sont des abeilles qui, comme des ombres, semblent surgir du néant où la folie des hommes risque de les conduire à tout jamais. Depuis quelques années, en effet, la population d’abeilles est en très forte diminution, avec une disparition totale sur certaines zones. Ce phénomène porte le nom de «syndrome d’effondrement des colonies d’abeilles » : subitement, les ruches se vident de leurs abeilles sans que l’on ne retrouve aucun cadavre à proximité.
Silence assourdissant.
Et si la vie des abeilles était une métaphore secrète de la vie des hommes ; la ruche, un condensé de l’existence ; leur bourdonnement un écho du murmure de nos vies ?
Olivier Perrot a voulu leur rendre hommage. Mais la danse que ses abeilles offrent à notre regard est macabre. Leur trace, ici fixée sur le papier photosensible par le soleil grâce à la magie de la technique du photogramme, est une ombre fantomatique. Le signe d’une inquiétude. Petit peuple industrieux qui se consume et s’épuise, le soleil qui a révélé l’image de ces abeilles ne les a pas réchauffées, il les a figées. Abeilles solarisées, surexposées, pétrifiées.
Inquiétante étrangeté.
Alors, écoutons Maurice Maeterlinck nous parler de la ruche et gardons nous bien de nous croire si forts…
« il y a là, en raccourci, de grandes et simples lignes que nous n’avons jamais l’occasion de démêler ni de suivre dans notre sphère démesurée. Il y a là l’esprit et la matière, l’espèce et l’individu, l’évolution et la permanence, le passé et l’avenir, la vie et la mort accumulés dans un réduit que notre main soulève et que nous embrassons d’un coup d’oeil ».
La vie des abeilles, Fasquelle éditeurs, 1901.
Hélène Favard, mai 2018

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